samedi 18 avril 2020

Denise Jallais - Week-end


Week-end


Et si tout à coup
La mer existait quelque part
Pour toi
Et pour moi
Une mer pour effacer les marais
Et clapoter sur nos mains

Tu écoutes les chevaux de mer
Ils écrasent le sable
J’invente le matin
Je cours pieds nus sur ta bouche
Tu rattrapes mon âme
Tu chasses les crabes
Ils viennent grésiller sous ta paume
Tu les chasses encore
L’odeur du vent
Te lèche et te griffe

Et si tout à coup
La mer existait quelque part
Pour toi
Et pour moi

Il n’y a jamais de maisons
Mais du sel
Des charrettes de varech
Des étoiles recroquevillées
Des flaques-mirages
Qui reculent avec ton ombre et la mienne
Si pareilles
Si pareilles
Que l’on nous prend pour deux frères

Et si tout à coup
La mer existait quelque part

Tu prendras la barque
Et tu rames
Les vagues sont creusées
Par ton poids et le mien
Je te parle
Les mots se coupent
Nous partageons les noyaux
Tu dors
Je crie
L’odeur nous dessine
Les oiseaux nous pêchent
Tu es nivelé par le vent
Je suis nivelée par le vent

La mer est là
Quelque part

Denise Jallais

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